01. La culture liée à l'histoire des Sourds

L’histoire des Sourds est un élément important de la culture sourde. De la même manière que l’Histoire commence avec les traditions orales et la création de l’écriture, l’histoire de la communauté sourde commence avec la langue des signes. On y apprend les épreuves et défis surmontés par les Sourds pour la reconnaissance et le respect de la langue des signes. L’histoire raconte, au meilleur de nos connaissances, la naissance de la culture sourde, de certaines de ses valeurs et de ses mythes.

02. Culture sourde

Extrait du site web de l’Institut Raymond-Dewar (Centre de réadaptation / surdité):

Le concept de culture sourde résonne avec ambiguïté pour les entendants qui ne sont pas familiers à ce monde particulier. On est davantage disposé à traiter de la surdité sous l’angle unique de la déficience sensorielle. Pourtant, lorsque l’on s’ouvre à connaître véritablement le monde des Sourds (l’utilisation du «S» majuscule désigne ici l’appartenance culturelle), on se rapproche et se sensibilise à une réalité tout autre. Des anthropologues et des sociologues ont d’ailleurs reconnu l’existence d’une culture sourde.

La culture de la communauté sourde prend d’abord racine dans son histoire qui a jalonné son évolution difficile où les obstacles ont contribué à consolider les forces vives de ce groupe minoritaire. L’organisation du milieu associatif sourd, la presse silencieuse, les activités religieuses, sportives et sociales constituent des lieux ou espaces qui ont permis et qui permettent encore la transmission de la langue des signes et de toute une tradition culturelle entre personnes sourdes. La poésie et l’humour sourds constituent d’autres éléments distinctifs de ce groupe culturel auxquels peu d’entendants accèdent tant son contenu est intimement lié à la culture d’appartenance de l’individu.

Le Centre de réadaptation Institut Raymond-Dewar (CIUSSS-Montréal) reconnaît l’existence d’une communauté sourde québécoise distincte, utilisant la langue des signes québécoise (LSQ), ayant une culture qui lui est propre.

03. Culture sourde (suite)

L’expression de « culture sourde » désigne un ensemble de représentations, de savoirs, de pratiques, de règles sociales, de comportements et de valeurs propres au groupe social constitué par l’ensemble des Sourds et de leurs proches qui communiquent avec une langue des signes et partagent un même référentiel, des mêmes lieux associatifs, des mêmes habitudes.

Selon Yves Delaporte, alors que les entendants définissent les personnes sourdes en fonction de leur déficit auditif, les Sourds eux-mêmes partagent le monde en deux catégories en fonction du mode de communication : ceux qui communiquent à l’aide de la parole, et ceux qui communiquent à l’aide des signes. Selon ce point de vue, il s’agit donc d’une différence culturelle et non d’une « déficience physiologique »; en effet, certains malentendants équipés de prothèses auditives et ayant eu une rééducation oraliste participent davantage à la culture entendante, et peuvent même ne pas avoir intégré la culture sourde, s’ils n’ont pas ou peu appris la langue des signes et vécu presque exclusivement avec des entendants; au contraire, un entendant ayant des parents sourds peut avoir appris la langue des signes en tant que langue maternelle et avoir vécu principalement dans un environnement social de culture sourde.

Comme l’ont établi plusieurs recherches dans les années 1960, notamment à partir de celles du linguiste William Stokoe, les langues des signes utilisées par les Sourds sont des langues à part entière, utilisant une double articulation et possédant des structures sémantiques, syntaxiques et phonologiques qui leur sont propres et permettent des nuances d’expression différentes des langues parlées : elles ont leur propre humour, poésie, registre familier, etc. De plus, les signes, comme les mots, possèdent de multiples sens dérivés ou métaphoriques.

Au-delà de cet aspect purement linguistique, ces recherches ont également mis en évidence la dimension sociologique de la culture sourde, qui est un élément fondamental de sa spécificité; en effet, les Sourds, en raison de leurs difficultés à communiquer avec les entendants, ont tendance à être exclus de la société des entendants et à former un groupe minoritaire restreint à ceux qui communiquent avec une langue des signes, et ce groupe développe une sous-culture qui diverge d’autant plus fortement de la culture entendante de la société à laquelle ce groupe appartient que sa marginalisation est prégnante.

04. Culture sourde (suite)

La Convention relative aux droits des personnes handicapées demande la reconnaissance de la culture sourde comme un des droits culturels.

Depuis 2019, le Canada a adopté les modifications demandées à sa loi sur l’accessibilité pour l’inclusion sociale des personnes handicapées, permettant ainsi aux citoyennes et citoyens, Sourdes et Sourds, d’avoir accès égal, en langue des signes (ASL, LSQ et langue signée par les Premières Nations), aux services et documents publics.

Note au lecteur: nous préférons vous encourager à acheter le film de Nicolas Philibert mais des abonnés YouTube ont déjà mis en ligne son œuvre, émus comme nous de son art:

« 

Qu’importe la surdité de l’oreille, quand l’esprit entend. La seule surdité, la vraie surdité, la surdité incurable, c’est celle de l’intelligence. 

– Victor Hugo